Nawakim 2020 - Episode 1 : La menace grabataire

NAWAKIM 2020
Episode I : La menace Grabataire

HRP : Surtout, surtout, ne prenez rien au sérieux, et n'essayez pas de trouver la moindre cohérence dans le vieillissement des personnages...


Jagounet - non, pardon, Jag - était assis - avachi serait plus exact - sur un rocher qui surplombait les Bois d'Aël. Gratouillant pensivement la barbe qui ne se décidait pas à lui pousser au menton, il songeait à l'avenir. Et quel avenir !

Il se voyait déjà Général de l'armée fadakimienne. Non, même, général en chef de la Confédération GUIMAUVE ! Ou alors dictateur. Il ne savait pas trop. Mais une chose était sûre, il avait un bel avenir devant lui.

Pas comme cette idiote de Swaëlia qui se précipitait vers lui en courant comme si la fin du septième âge était arrivée !

- Jagounet ! Jagounet ! hurla-t-elle à pleins poumons alors qu'elle était à à peine quelques mètres de lui.
- Jag ! grommela son frère, qui détestait encore plus son prénom quand c'était sa soeur qui le prononçait. Et je suis pas sourd.
- Il faut que tu viennes, vite, maman et Silar se sont mis en tête de danser une valse !

Jagounet - pardon, Jag - soupira. La dernière fois qu'ils avaient laissé ces deux là danser, ça avait failli tourner au drame. Non, ça avait tourné au drame. Il préférait ne pas y penser...

- T'as oublié de mettre ta jupe, Swa... remarqua-t-il sur un ton désabusé.
- Mais non, voyons, c'est ma toute nouvelle robe, fit la jeune fille en se pavanant dans son petit bout de tissus qui lui couvrait à peine le haut des cuisses. Comment tu la trouves ?

Il lui adressa un coup d'oeil éloquent et s'abstint de tout commentaire. Il avait déjà assez des deux vedettes de la danse à raisonner, il n'avait pas envie de devoir en plus éponger les torrents de larmes de sa soeur. Il se leva avec fatalisme et prit la direction du château d'un pas décidé.

La fête battait son plein au château. En arrivant dans la salle de réception, Jagounet - non, pardon, Jag - constata que tous les seigneurs des environs étaient réunis là. Mais comment avaient-ils donc faut pour se retrouver là ? Deux heures plus tôt, le château était pour ainsi dire vide, et il n'avait vu aucun visiteur arriver. Apercevant Aëlissandya et Silar au centre de la piste de danse, tout tremblants sur leurs jambes fatiguées, prêts à s'élancer à la première note de musique, il comprit qu'il allait avoir besoin d'aide.

- Swa, où sont les autres ?
- Skar'a est dans sa chambre, Hyléria et W'la sont dans la cour...
- Va chercher Hyl et W'la, je m'occupe de Skar'a.

La jeune fille partit en gambadant vers la cour, sous le regard désabusé de son frère qui se demandait toujours comment elle avait osé appeller ça une robe...
Mais ce n'était pas le moment de flâner. Il grimpa quatre à quatre l'escalier qui menait à l'étage, où se trouvaient leurs chambres. S'arrêtant devant la deuxième porte, il frappa un coup, entrouvrit la porte et passa prudemment la tête dans l'entrebaillement.

La pièce était un immense chantier. Le lit avait été retourné et plaqué contre le mur pour gagner de la place. Toute la surface de la chambre était occupée par un immense château de cartes. Jag pouvait voir le détail des tours et tourelles, le pont-levi qui, connaissant le constructeur, devait probablement fonctionner comme un vrai, et même les girouettes sur le sommet des toits qui tournaient doucement. Une véritable oeuvre d'art.
Visiblement, Skar'a avait retenu la leçon de ses derniers essais. W'la avait la fâcheuse manie de rentrer dans la chambre sans prévenir, et plus d'une fois le château avait été démoli par l'ouverture de la porte. Cette-fois ci, il y avait la place d'ouvrir la porte et même de faire un pas dans la chambre.

- Ska ? appella-t-il, convaincu que son frère se cachait quelque part dans une des cours du château de cartes.
- Là-haut !
Il leva la tête au plafond. Skar'a était là, suspendu à la place de son lustre, pile à la bonne hauteur pour poser la dernière carte sur la plus haute tour.
- Comment t'es arrivé là ?
- J'ai accroché une corde à la poutre à côté de la porte et je l'ai fait passer dans l'attache du lustre. J'ai fait un noeud autour de ma taille, et voilà. Au fur et à mesure que je construit les niveaux, je raccourcis la corde. Comme je suis suspendu au dessus du château, je risque pas de cogner dedans et de faire tomber ce que j'ai déjà fait.
- Hum hum, fit Jag. Bien trouvé. Et comment tu fais pour descendre maintenant ?
- Heu...
Le garçon observa un instant le château en dessous de lui, la corde qui partait à côté de la porte... S'il relâchait la corde raccourcie pour monter jusque là, il allait tomber droit sur le donjon. Pas d'appui à portée de pied, rien à quoi s'accrocher pour contrôler sa descente.
- Heu... répéta-t-il.
Jag se contenta de cette réponse. Il tira sa dague de son fourreau et trancha d'un coup sec la corde qui retenait son frère. Skar'a tomba tout droit sur le donjon, comme prévu, et aplatit tout son château par la même occasion.
- On a besoin de toi en bas, déclara Jag sans état d'âme avant de repartir d'un pas décidé vers la salle de réception.

Jagounet descendait quatre à quatre les escaliers mal éclairés quand il percuta de plein fouet un obstacle qui venait en sens inverse. Emporté par son élan, il dégringola les escaliers dans un bruit fracassant et partit s'étaler contre l'armure décorative qui se dressait au bas des marches.

Quand Skar'a arriva en bas des escaliers en boitillant, il découvrit avec stupéfaction un méli-mélo de jambes et de bras et une armure oscillant dangereusement juste au dessus.
- Heu... Ska... grommella Jagounet sur un ton inquiet. Empêche ce machin de tomber...
Skar'a, tout endolori suite à sa propre chute, se demanda un instant s'il devait faire semblant de ne pas avoir entendu. Ayant identifié les deux personnages emmêlés, il n'avait pas la moindre envie de les aider. Pas après tout ce qu'ils lui avaient fait subir... D'un autre côté, s'il ne les aidait pas, ils risqueraient de se venger, et ce serait pire que la mort...
L'armure décida pour lui. Dans un grincement à faire se dresser les cheveux sur la tête, elle s'abattit sans pitié sur le crâne du compagnon d'infortune de Jagounet - non, Jag - pendant que Skar'a filait sans demander son reste.

Tout en grommellant sa rage contre son incapable de frère, Jagounet commença à se tortiller pour se libérer. L'armure grinçait à chaque mouvement et pesait de plus en plus, mais il finit par réussir à s'en dégager.
Il regarda pensivement le petit corps assomé à côté de lui. Tippu, ou N°6 comme l'appelaient couramment ses cinq aînés, avait débarqué dans leur vie comme un ouragan quelque temps après le mariage de leur mère avec Silar. Ils l'avaient adoré - jusqu'au jour où il avait commencé à marcher. Face à lui, les cinqtuplés avaient petit à petit appris à oublier momentanément leurs querelles pour faire front commun contre l'ennemi...
Jagounet poussa doucement son petit frère du pied pour s'assurer qu'il était bien évanoui. Pas de danger immédiat, jugea-t-il. Il pouvait retourner à ses occupations.

Il débarqua dans la salle de réception en courant. D'un regard, il vérifia que Swaëlia avait bien ramené W'la et Hyléria. Pour une fois, elle avait été efficace...
Au milieu de la piste, Aëlissandya et Silar étaient immobiles. Si on faisait abstraction de leurs tremblements, naturellement. Juste à côté d'eux, Diabloca, la chef des DragonSoul, et son époux Warpath se tenaient la main. Eux aussi avait vieilli. Jagounet se souvenait encore avec émotion du jour où il avait décidé de choisir l'orc pour modèle. C'était avant de savoir ce qu'étaient les ravages de la vieillesse...
- Jaaag... balbutia Swaëlia d'une voix tremblante.
Jag la regarda, surpris, et constata qu'elle était blème de peur. Elle fixait un point en hauteur. Fronçant les sourcils, Jag faillit lui demander ce qui lui arrivait encore, quand il réalisa que W'la et Hyléria étaient dans le même état. Cela ne leur ressemblait pas...
Un coup d'oeil autour de lui lui fit constater que tous les convives regardaient dans la même direction, les uns effrayés, les autres perplexes.
A son tour, il leva les yeux.

Nerull savourait avec délectation ce moment de gloire. Il n'avait pas été difficile de transporter tous les seigneurs de Nawakim au même endroit - plus pratique pour s'assurer que tous entendent le message. Après son apparition dans un nuage de fumée noire, il avait fallu quelques minutes avant que quelqu'un s'en aperçoive. Il avait d'ailleurs eu peur que cela réduise son petit effet à néant. Mais finalement, toute l'assemblée le dévisageait, les regards chargés de terreur, et il en était absolument ravi.

Il allait commencer son discours quand un jeune mort-vivant fit irruption en courant dans la salle. Nerull ne put réprimer une grimace d'irritation. Les retardataires le mettaient toujours en rogne. D'un autre côté, il était sur le point de dominer le monde, il pouvait bien attendre quelques secondes supplémentaires que le jeune trouble-fête se décide à regarder dans sa direction et se mette à trembler comme une feuille lui aussi.

Enfin, Jagounet - pardon, Jag - leva les yeux. Les plissa. Puis les ouvrit tous grands.
- Qu'est-ce que c'est encore que ce machin ? Hyl, c'est toi qui.. ?
A ces mots, Nerull vit tout rouge. Ce jeune insolent ne perdait rien pour attendre. Il allait avoir la peur de sa vie quand il comprendrait qui il avait osé insulter !
Nerull se mit à enfler et à produire des éclairs et de la fumée. Jagounet haussa un sourcil.
- TREMBLEZ, MISERABLES VERMISSEAUX ! JE SUIS NERULL LE FAUCHEUR ! DEVANT MOI TOMBE QUICONQUE OSE ME DEFIER ! CEUX QUI SONT MES ENEMIS, JE LES EGORGE, JE LES EMPALE, JE LES ETRIPE ! J'EXTERMINERAI LA VERMINE DE CES TERRES ! JE DETRUIRAI TOUT JUSQU'A CE QUE SALUKI TOMBE A GENOUX DEVANT MOI ET ME SUPPLIE D'EPARGNER SA MISERABLE EXISTENCE ! JE SUIS...

Ce fut ce moment que choisit Tippu pour entrer dans la salle en courant, tout dépenaillé, les cheveux en bataille, fidèle à lui-même, et une grosse bosse sur le haut du crâne en prime. Tout en se précipitant vers sa mère, il criait sur un ton geignard :
- M'man ! M'man ! Jagounet y m'a tapé et y m'a assomé et y...
- QUI OSE M'INTERROMPRE ? tonna Nerull, hors de lui.QU'IL SE DENONCE, OU J'EXTERMINERAI LES HABITANTS DE CE CHATEAU JUSQU'AU DERNIER ! JE L'EGORGERAI ! JE L'EMPALERAI ! JE L'ETRIPERAI !
Tippu s'arrêta brusquement en glissant légèrement sur les dalles, jeta un très rapide coup d'oeil à la créature hideuse qui flottait dans les airs, et pointa aussitôt le doigt sur Jagounet - non, Jag.
- C'est lui m'sieur.

- Merci. Merci beaucoup, N°6, grommela Jagounet, pas le moins du monde surpris.
Le gamin lui tira la langue pour toute réponse.

- ECOUTE MOI BIEN, PETIT CLOPORTE ! s'écria Nerull. JE SUIS NERULL ! NERULL LE FAUCHEUR !
- J'ai déjà entendu ça quelque part, répliqua Jagounet en haussant les épaules.
A côté de lui, Swaëlia réprima un peti cri, à mi chemin entre l'admiration pour le courage de son frère et la terreur de ce que Nerull pouvait lui faire subir.

Ce dernier était sur le point d'exploser de fureur, mais Aëlissandya le prit de vitesse :
- Dis donc, non mais dis donc, Jagounet ! s'insurgea-t-elle d'une voix chevrotante. Non mais dis donc !
- Mais c'est vrai quoi, se défendit Jagounet, il l'a déjà dit tout de suite !
- Non mais dis donc ! asséna la vieille elfe avec toute la force dont elle était capable.
Elle en perdit l'équilibre et chancella sur ses jambes frêles. Heureusement, Silar était juste à côté d'elle, à peine plus valide, mais à eux deux ils pouvaient se faire mutuellement office de béquille.

- De toute façon c'est pas poli d'interrompre les gens, minauda Tippu en se plaçant ostensiblement à côtéde ses parents. Hein oui, papa ?
- Ah oui, ça c'est bien vrai, acquiesça Silar en faisant osciller son triple menton.
- En plus il a fait exprès, ajouta le petit chenapan en secouant la tête d'un air moralisateur.
- N'importe quoi ! s'exclama W'la. C'est toi qui l'a interrompu le premier.
Dans un bel ensemble, les quintuplés se rangèrent côte à côte face à N°6. C'était la règle : quels que soit les différents entre eux, face à Tippu, on se serrait les coudes.
- Ouais d'abord ! enchaina Hyléria. Et toi tu l'as accusé alors que c'était même pas vrai.
Le gamin allait sortir sa meileure arme. Face à lui, n'importe quel crocodile aurait fait pale figure. Il avait un don pour faire surgir des larmes plus vraies que nature sur commande. Et bien sûr, les adultes se mettaient systématiquement à s'apitoyer sur le sort du pauvre petit martyrisé par ses frères et soeurs...

- VOUS ALLEZ M'ARRETER CA ET M'ECOUTER BANDE DE CLOPORTES !!!!!