[Concours RP - Dieux de Nawakim] Quelques autres, en vrac...

Installé à un écritoire, un jeune garçon lisait un exemplaire de l’Inventaire Divin et Céleste de Nawakim écris pas Théodore d’Agrimne, célèbre théologien du siècle dernier.
Le jeune adolescent dévorait les pages et s’extasiait devant les gravures parsemant les chapitres.

Il était arrivé en salle d’étude un peu plus tôt en fin d’après midi. Il pensait que c’était là le meilleur endroit pour se cacher et éviter ses corvées. La salle d’étude des dernières années ! Pas de danger que quelqu’un ne vienne avant des heures.
La barbe des corvées de fin de semaine !
Cette fois, ils se passeraient de lui, et puis il avait entendu dire que le jeune Albreich était souffrant et que ses corvées seraient dévolues à un autre. Avec sa chance ça lui serait sûrement tombé dessus, à n’en point douter.

Il était donc venu en salle d’étude pour attendre le soir, et, l’ennuie aidant, il finit par ouvrir un énorme livre qui traînait sur un pupitre. Le feuilletant d’abord au hasard des illustrations, il finit par entamer la lecture du premier chapitre.

Ses cheveux bruns coupés au bol, laissaient apparaître sur le sommet de son crâne une tonsure rectangulaire affichant à tous, son statut de jeune novice. Sa longue robe de bure grise nouée, à la taille, par une épaisse chaîne ne le protégeait que moyennement du froid qui commençait à gagner la pièce. Il se leva et alla chercher son châle de laine accroché derrière la porte de l’étude. L’ajustant sur ses épaules il se rassit et reprit sa lecture.
Quelques minutes après il entendit des pas las qui gravissait les larges marches de pierre menant ici. Il jeta nerveusement un coup d’œil à la chandelle posée sur le bord de l’écritoire. Il eut un coup de sang en voyant que celle-ci avait brûlé presque intégralement. Combien de temps avait il passé ici, plongé dans ces récits merveilleux et fantastiques ? Un regard à la fenêtre lui appris qu’il faisait nuit noire dehors.

Il pensa que ce devait être frère Noitacude qui venait ranger les ouvrages de la journée. Le Frère allait sûrement le tancer vertement avant de lui infliger de nouvelles corvées…le frottement des pas sur le granit lui indiquait que l’objet de sa crainte était pratiquement derrière la porte maintenant.
Vite, il lui fallait trouver une attitude à prendre, une feinte à jouer…tenter l’étourderie et le repentir sincère ou essayer carrément l’oubli studieux dans la passion de la lecture et de l’étude…
Un bref instant de réflexion….
Après tout la deuxième option était presque vraie… Autant la jouer.

La porte s’ouvrit et le vieux frère entra, des livres sous un bras et une lanterne dans l’autre main.
- Maurvaihn ! Mais que fais tu ici ? Tu devrais être avec les autres à faire tes corvées du soir ! D’abord surpris, le moine paraissait maintenant plutôt courroucé.
Jouant l’étonnement de se faire surprendre si tard, Maurvaihn sauta de sa chaise et se tint le corps raide et la tête baissée, enchaînant sur les excuses qu’il avait déjà esquissé dans son esprit quelques secondes plus tôt. Il se tortillait les doigts avec un naturel frisant l’art de la comédie.
– Je vous prie de m’excuser Frère, je.. j’étais à mon étude théologique cet après midi et … je ne … allez encore une petite hésitation, ça rendait les excuses plus spontanées et donc plus crédibles, …je … je ne me suis pas rendu compte du temps qui passait. C’était tellement captivant.
Le frère se radoucit un peu.
- Que lis tu donc, qui te face oublier tes devoirs envers la congrégation ? Fais moi voir.
Le vieux moine posa ses livres sur un écritoire vide et levant sa lanterne, se pencha sur l’imposant volume.
- hmmm.. ha !oui Théodore d’Agrimne ! Ah un auteur captivant, bien que peu renommé pour ses vertus académiques. Allez file vite rejoindre tes…
- Que signifie peu renommé pour ses vertus académiques ? Le coupa le moinillon.
- Et bien cela signifie qu’il avait une belle façon de coucher les histoires sur le papier, mais que ses sources n’étaient pas toujours très sérieuses. Voilà, et n’oublie pas ta chandelle, tu sais ce que le recteur principal a dit au sujet des risques d’incendie…
- Ça veut dire que tout ce que j’ai lu dans ce livre est… faux ?

Le vieux frère déjà essoufflé par son ascension eut la subite envie de s’asseoir. Il tira un tabouret à cotés de l’écritoire et s’y laissa tomber.
- Non bien sur que non. Tout est vrai, mais disons que d’Agrimne a prit soin de modifier, d’enjoliver, de romancer certains passages afin de les rendre plus .. intéressant à lire.
Devant l’air perplexe du petit novice, le frère décida une autre approche.
- Humm…Vois tu les desseins des dieux ne sont pas toujours des plus compréhensibles pour nous simples mortels, alors quelques fois il est besoin de travestir un peu les événements où même d’en inventer certains pour pouvoir avoir l’impression de saisir le monde dans lequel nous vivons. Comprends tu ??
- Euh.. non pas très bien. Ysdania la vertueuse ne nous apprend-elle pas la vérité, la justice et la connaissance ? Pourquoi avoir besoin de travestir son enseignement ?
- Non ce n’est pas ce que j’ai dit. Bien sur que notre déesse Ysdania nous tient dans la vérité de toute chose et de tout acte. Rien n’est plus sur et plus vraie que sa lumière dispensatrice de justice et rien n’est plus important à nos yeux que l’apprentissage par l’étude des sciences. Tout cela doit être d’une certitude inébranlable pour toi.
Le vieux moine se redressa sur son tabouret et mit sa main droite sur son cœur. L’œil pétillant de fierté et le menton haut, il récita :
- Soit un vertueux dans ta vie, un juste dans tes actes et un érudit dans toutes choses ! Tu te souviens de cette profession de foi ?
Le garçon acquiesça de la tête.
- Oui et je sais que c’est pour ça que Ysdania est une belle femme portant le livre de la connaissance dans une main et le glaive de la justice dans l’autre.
- Voilà la seule vérité que tu ais besoin de connaître sur notre déesse Ysdania.
Le jeune étudiant fronça les sourcils et fit la moue : - Je comprend, d’Agrimne a gardé l’essentiel mais s’est permis de « traficoter » les choses moins importantes.
Frère Noitacude rigola un bref instant : - Oui on peut dire ça, il a …traficoté.. c’est ça.
- Mais s’il a fait ça, ne pourrait il avoir commis d’autres traficotages ?
- Que veux tu dire ? As-tu lu des choses qui t’ont paru « traficotées » ?
- Oui… Enfin je crois. Il parle ici de Ludejai d’Exureri qui est le dieu que mon oncle priait avant de partir à la bataille et …
- Gae ! Pas jai ! Tu prononces mal, c’est Ludegae d’Exureri, le reprit le vieux moine.
- Oui Ludegae, pardon frère. Et là il parle de Slaars qu’il désigne aussi comme dieu de la guerre et de plein d’autres choses méchantes.
Le jeune garçon leva un regard avide de réponse en direction du vieil érudit.
- Ton oncle j’imagine, n’était pas quelqu’un de mauvais ? Il était soldat et devait faire la guerre par devoir et non par méchanceté. Il vénérait sûrement Ludegae pour qu’il lui donne la force, l’intelligence et le courage de vaincre ses ennemis. Ludegae règne sur le domaine de la guerre dans ce qu’elle a de plus noble et de plus exaltant. La stratégie, la tactique, la balistique, la ruse, l’exploitation du relief, la connaissance de l’ennemi, l’art du combat à l’épée, tout cela représente de hautes matières dans lesquelles le gentilhomme se doit d’exceller, il doit porter cette science au niveau de l’oeuvre d’art . Mais la guerre est aussi le théâtre de hauts faits glorieux et légendaires. Des actes d’un héroïsme inouï qui peuvent sauver des royaumes ou précipiter leur fin. C’est ainsi que Ludegae assure son autorité sur la guerre. Pour lui, et ceux qui suivent son enseignement, elle est affaire de gentilshommes, de héros et d’érudits.

- Alors que pour Slaars, la guerre n’est qu’une vaste farce dont il est le seul à rire. Pour lui, elle ne s’exprime que dans la violence, la sauvagerie et la haine. Slaars n’a que faire de preux chevaliers qui s’apprêtent à charger une régiment de fiers hallebardiers. Il se moque des codes d’honneur qu’afficheront ces deux ennemis lors de leur affrontement. Lui ce qu’il voit c’est la bête inhumaine tapie en chacun d’eux et qui tentera de prendre le dessus afin de les pousser aux pires ignominies.
- Et ça arrive ???
- Quoi donc ?
- ben…que la bête là, celle qui est tapie, elle y arrive à les pousser aux pires ignominies…
- Certains résistes et gardent le contrôle de leurs actes, mais d’autres succombent facilement à la colère et la furie. Cela dépend des hommes.
- Ah ? Et pourquoi y a-t-il Vailine déesse de la poésie et des chansons, et Orwin Baer le maître des muses, le dieu de l’inspiration ? N’est ce pas la même chose ?
- Pffff… ! Ta soif de connaissances doit ravir Ysdania, petit Maurvaihn, mais je dois dire que pour ce soir elle commence un peu à me lasser…
- Ô frère, je vous en prie c’est là ma dernière question !
- Bien ! Vailine aime les poésies légères comme l’air du printemps tout autant que les longues et lourdes déclamations de vers des gestes épiques de l’ancien temps. Et pareillement une ronde enfantine la ravira de même façon qu’un air d’opéra à quatre voix. Mais il est rare qu’elle soit à l’origine du moindre refrain ou du moindre alexandrin. Disons qu’elle excelle dans l’art de mettre un artiste en condition de créer ou de le préparer à un récital. Elle peut même intervenir, si elle tombe elle-même sous le charme d’un interprète, pour que son talent soit décuplé et explose aux yeux de son auditoire. On dit alors que Vailine l’a caressé de ses ailes.
- Oh oui ses ailes ! On dirait une fée avec ses ailes de papillon et sa robe de plume blanche, qu’est ce qu’elle est belle…
- Oui beaucoup d’artistes aiment à la représenter ainsi.
- Mais c’est tout ! Elle n’intervient que pour ça ?
- Non, il y a une foule de domaines où l’art lyrique s’exprime. On invoque ainsi Vailine lors d’une première au théâtre. Les musiciens des rues la vénèrent, également, afin qu’elle veille à remplir leur écuelle d’espèces sonnantes et trébuchantes et… les jeunes hommes épris d’une douce demoiselle et qui s’apprêtent à lui jouer la sérénade sous sa fenêtre, adressent toujours un petit mot à Vailine, avant même de prier Linumiel déesse de l’amour, afin que leur voix reste envoûtante et ne déraille pas.
- Oh ! Le jeune novice était encore à un âge où les choses de l’amour apparaissaient d’un ennui mortel. Aussi enchaîna-t-il sans attendre. - Et Orwin Baer ?
- Comme tu l’auras sans doute compris, lui, son royaume c’est le souffle de l’inspiration. Si tu veux écrire un livre, une pièce de théâtre, une chanson, une recette de cuisine…
- Une recette de cuisine ???
- Oui, une recette de cuisine, ne crois tu pas que la cuisine soit un art ?
Le jeune élève fit une grimace évocatrice et le vieil érudit sourit :
– Oui c’est vrai…. Je ne crois pas que la muse de l’art culinaire rendre souvent visite au frère cuisinier. Mais crois moi, il y a des gens qui font de chaque repas une véritable œuvre d’art. Et si tu veux exceller dans ce domaine ou dans un autre, c’est pour Orwin Baer qu’il te faudra allumer des cierges. Il commande aux muses, et si tu lui es agréable il t’enverra alors la visite de la muse correspondante à l’art que tu exerces.

Le garçon se pencha sur le livre et tourna quelques pages. Il s’arrêta à une gravure représentant un jeune homme habillé avec goût et ostentation, tenant dans sa main droite une plume d’oie et dans le creux de son bras gauche une harpe d’or. Tout autour de lui papillonnaient de minuscules petites représentations de femmes vêtues de voiles transparents.
- Les muses se sont ces petites femmes à moitié nue qui volètent autour de Orwin Baer ? On dirait des fées elles aussi, comme Vailine.
- Oui tu as raison. Tu es très observateur ! On raconte que Vailine était autrefois une Muse. La légende dit qu’elle aurait séduite Orwin Baer afin qu’il lui accorde sa liberté. Ce qu’il fit visiblement, mais en échange, Vailine dû lui promettre de ne jamais plus inspirer un artiste. Orwin Baer voulait sans doute réserver ce domaine à ses petites compagnes. Alors donc pour résumer, tu auras besoin des muses de Orwin Baer pour écrire une œuvre mais il te faudra les bonnes grâces de Vailine pour la présenter au public.

Les yeux du novice se firent rêveur. - Comme j’aimerais que Orwin Baer m’envoie une de se muses et que Vailine me caresse de ses ailes…
- Ha ha ha ! Le frère se releva doucement, affichant un grand sourire, mais il l’ont déjà fait, et pas plus tard que tout à l’heure. A l’instant même où j’ai poussé cette porte et que tu m’as récité tes excuses….
Le jeune Maurvaihn rougit et baissa les yeux.
- Allez, apprenti romancier, maintenant file ! Tu as encore toutes tes corvées du soir à faire… Et… je crois savoir que le petit Albreich est alité, ce serait charitable de ta part que tu t’acquittes aussi des siennes… Ce serait charitable… et très pédagogique, ne crois tu pas ?